En partant de l'analyse de la domination chez Marx Weber, nous avons voulu nous arrêter sur une domination silencieuse de notre temps : la domination au travail. Il s'agit d'analyser ici les rapports de domination entre le manager et ses employés dans l'entreprise moderne. L'autorité du manager repose sur une domination charismatique et bureaucratique et se manifeste aujourd'hui par une domination physique et psychologique qu'il s'agit de dénoncer. Le 27 février 2000, la justice française se prononçait en qualifiant pour la première fois un suicide d'accident du travail. En effet, ces dernières années, les médias et la justice accordent beaucoup plus d'importance aux nouvelles pathologies de l'activité professionnelle dues aux harcèlements ou aux pressions psychologiques. On reconnaît alors de nouvelles formes de domination au travail Dans quelle mesure l'entreprise de troisième type issue de la logique managériale se démarque-t-elle de la domination patronale traditionnelle et comment exerce-t-elle une domination insidieuse et machiavélique sur ses salariés ?
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Sommaire de l'exposé
La domination dans le travail : mythe ou réalité ?
Les mythes de l'idéologie managériale
De la réalité d'une domination insidieuse
La ' barbarie douce du management '
Le travail comme usure mentale
De la panoplie des méthodes raffinées et perverses de domination
Extraits de l'exposé
[...] On peut d'abord parler de l'utilisation du modèle de bouc émissaire comme un de ces instruments. Le roman d'Amélie Nothomb Stupeurs et tremblements en caricaturant le modèle managérial japonais rend bien compte de l'utilisation de l'humiliation centrée sur un employé par le manager pour asseoir sa domination. On connaissait le travail comme lieu de souffrance physique, c'est aujourd'hui également un lieu de souffrance psychologique importante car, la plupart du temps, refoulée par peur de licenciement. Le harcèlement est donc incontestablement une nouvelle forme de domination. [...]
[...] Cependant, il semble que l'on assiste aujourd'hui à une remise en cause du modèle managérial, du culte de l'excellence et à un retour sur l'individu qui se manifeste par la croissance des modèles de free lance dans la nouvelle économie. Bibliographie Ch. DEJOURS, Souffrance en France, la banalisation de l'injustice sociale, Seuil, Paris DURIEUX et JOURDAIN, L'entreprise barbare, Albin Michel, Paris A. NOTHOMB, Stupeurs et tremblements, Albin Michel, Paris Mr. HIRIGOYEN, Le harcèlement moral : la violence perverse au quotidien, Syros X. de la VEGA, Les nouvelles formes de dominations au travail, in Sciences Humaines, n 158, p29-47. [...]
[...] Il y a une injonction à être bien en entreprise. Avec l'imposition de ce modèle d'excellence, on assiste alors à l'apparition d'un mal-être généralisé mais inavoué comme l'atteste la surconsommation d'anxiolytiques, les dépressions larvées ou les nombreux suicides d'employés japonais dans les années 1970. Le système managérial conditionne alors l'idéal du moi salarié ancré dans un défit permanent et menacé par une remise en cause de l'individu au moindre faux pas. On peut donc parler d'une maladie de l'idéalité que provoque ce décalage entre le modèle et la réalité de l'être. [...]