Jugement de Montesquieu : " Ce roman dont le héros est un fripon et l'héroïne une catin. "
Manon Lescaut vit de ses charmes. Desgrieux profite de la situation sous forme d'un greluchon (= amant de cœur d'une prostituée) et comme proxénète.
Le "réalisme" dans Manon Lescaut est un réalisme social essentiellement.
Manon Lescaut est le résultat d'une véritable défense du genre romanesque au XVIIIème siècle, du roman en tant que genre littéraire à un moment où sa publication est considérée comme un genre inférieur car :
Ce n'est pas un genre codifié (pas de sujet donné…)
Ce genre est considéré comme un genre où se manifestent la fantaisie, une imagination débridée et une invraisemblance systématique. C'est donc un genre fait pour le divertissement et qui ne peut pas être pris au sérieux.
Ceux qui veulent écrire des romans vont vouloir légitimer le genre en démontrant que, loin d'être l'usage libre d'une imagination délirante, c'est un type littéraire qui peut rendre compte du réel, d'où la volonté de l'ancrage de l'intrigue dans une réalité historique et sociale reconnaissable par les lecteurs.
Manon Lescaut est organisé en fonction de la courtisanerie de Manon Lescaut. Il y a une place importante accordée au thème de l'argent. Est-ce l'argent qui détermine une grande partie des faits et gestes des héros ? Manon Lescaut est comme une espèce de proto-roman balzacien.
[...] Dans les 2 cas Manon Lescaut en est épurée. Il reste quelque chose d'irréductible que le récit de Desgrieux ne parvient jamais à restituer avec exactitude. Il ne peut jamais expliquer véritablement le mystère de Manon Lescaut qui apparaît comme un mélange inextricable de vice et de vertu, de perversion et de pureté, de corruption et d'idéal Pourquoi reste-t-il ce mystère ? car c'est une condition du roman qui en assure la portée. Elle ne doit jamais être définie complètement. [...]
[...] Elle veut vivre dans la société en profitant de la vie sociale. Elle ne peut le faire qu'avec de l'argent. C'est tout le contraire dans une autre société : celle du désert en Louisiane. Là, Manon Lescaut n'a plus besoin de vivre au diapason d'une société qui propose la séduction. Manon Lescaut va reverser sa passion amoureuse tout au bénéfice de Desgrieux. Elle devient ainsi un être de dévouement et de sacrifice. En changeant Manon Lescaut de société, on la change. [...]
[...] Célébration lyrique de Manon Lescaut. Il y a une véritable poétisation (mais floue). Desgrieux a les traits stéréotypés qui caractérisent le jeune noble. Il s'agit de former une sorte de couple idéal réuni par la jeunesse et la beauté. Le roman vise à célébrer l'amour tout en prétendant dénoncer la perversion des passions. La stratégie morale de Desgrieux (l'irresponsabilité), ainsi que celle du narrateur (le double jeu), fait qu'il est toujours conduit dans le texte à tomber dans le piège. [...]
[...] Le retour de Desgrieux à la société se fait après la mort de Manon Lescaut. Le roman est l'histoire d'un détour. Conclusion Manon Lescaut est la réunion de références culturelles sur la condition humaine, sur le rapport au christianisme, sur la passion On est donc loin de l'histoire sordide d'une catin et d'un fripon. L'abbé Prévost réalise le programme de réhabilitation du roman : Il peut prendre en charge une histoire inscrite dans la société dont les facteurs sont présentés objectivement (argent, immoralité A partir d'une histoire dans un cadre réaliste, les débats sont ceux posés par les grands genres littéraires de l'époque. [...]
[...] Il y a ces 3 éléments dans Manon Lescaut. Le trajet romanesque est le trajet tragique. Desgrieux a intérêt à raconter son histoire en la rendant conforme au schéma tragique. Il se déculpabilise car il est victime d'une force contre laquelle il ne peut rien. Tout se joue dès la scène de première rencontre. Dans ce récit, Desgrieux utilise le terme " ascendant " (vocabulaire de l'astrologie). Il n'y a pas d'espoir de retour en arrière. Il en est de même dans la scène des retrouvailles au parloir, où Desgrieux est incapable de résister à un " retour de flammes Morale de l'irresponsabilité que Desgrieux met souvent en avant. [...]
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