Il s'agit pour Loic Blondiaux de reprendre depuis le début la formation de ce qu'on appelle "opinion publique", re-inventer l'invention et avancer en même temps qu'elle. Ainsi, il insiste bien sur l'importance de la neutralité dans ce travail d'envergure, c'est pour cela qu'il ne prend parti à aucun moment dans son ouvrage pour une définition précise de l'opinion publique. Se contentant d'étudier à la même échelle les procédures et méthodes qui ont fait de l'opinion publique ce qu'elle est aujourd'hui et son contexte social et politique. Outre cette génèse de l'opinion publique, il a également porté son étude sur ses différents modes d'énonciation ainsi que les acteurs s'octroyant ce droit de faire parler l'opinion. C'est ici qu'intervient le sondage qui s'est affirmé au fil des années comme une définition chiffrée de l'opinion, et donc la plus légitime, méritant de ce fait une considération particulière. Il va ainsi tout d'abord analyser la naissance de la technique du sondage aux Etats-Unis (I - II), puis son exportation vers d'autres horizons et d'autres logiques sociales notamment vers la France (III - IV).
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Sommaire de la fiche de lecture
L'opinion publique introuvable
Une figure politiquement instable
Une croyance socialement fondée
Un objet scientifiquement insaisissable
L'opinion publique et ses porte-parole
La genèse d'un savoir
La mobilisation de la démocratie
Le ralliement de l'Université
La victoire d'une industrie
L'importation des sondages d'opinion publique
L'entrée en scène
La mise à l'épreuve
La recherche d'un public
Diffusion et triomphe des sondages d'opinion en France
La diffusion
Le triomphe
Extraits de la fiche de lecture
[...] ) que de la façon dont les individus doivent être interrogés (interview face à face ou par voie postale, question fermée ou ouverte . Car Roper et Gallup sont bien conscients que de cela dépendront les résultats de leurs sondages. C'est à ce niveau qu'apparaîtront donc des différences entre les deux hommes qui ne s'entendront que sur le sujet de la question fermée dans un commun souci d'efficacité (moyen d'obtenir une réponse claire et nette et sans soucis pour les sondeurs d'interprétation des réponses). [...]
[...] Malgré cette petite avancée, les indicateurs à choisir pour une étude de l'opinion restent flous. C'est ainsi qu'il a été tenté une utilisation du vote finalement jugé trop fruste et limité, ou encore de la presse, mais le lien entre les opinions exprimées par les journaux et les attitudes de leur lectorat ne peut pas être prouvé. II - L'opinion publique et ses porte-parole C'est donc l'invention du sondage qui va donner une forme précise à l'opinion publique, mettant fin à la tentative de définition dont elle avait fait l'objet jusque là. [...]
[...] Ainsi entre 1939 et 1965 la technique a été mise à l'épreuve, puis s'est diffusée. B / Le triomphe Il ne faut pas croire que la progression de la technique du sondage a suivi une courbe linéaire et toujours progressiste. Au contraire, alors qu'en 1945 les techniques semblent s'être rôdées, une légitimation été effectuée et son efficacité sont prouvées. Pourtant des les années cinquante une crise va survenir, le monde politique et donc journalistique se désintéresse des sondages, l'IFOP est au bord de la faillite à cause du manque de commandes. [...]
[...] On a alors affaire à une internationalisation de la recherche sur l'opinion publique, avec une mise en commun des techniques, des idées et des idéaux (démocratiques notamment). A partir de ce moment les instituts de sondages parviennent à intéresser politique et à convaincre l'opinion publique elle même de sa légitimité (malgré les réticences de certains partis comme le PCF). C'est ensuite face aux mêmes problèmes de reconnaissance de scientificité qu'ont connu leurs prédécesseurs américains que vont se retrouver confrontés les sondeurs français. [...]
[...] C'est ce que Loic Blondiaux appellerait un "retour en arrière", il explique alors l'inutilité de poser de telles hypothèses et rappelle l'utilité d'effectuer une enquête sur l'opinion publique à propos de l'opinion publique, comment a t-elle réagi face à cette nouvelle vision d'elle-même? C'est là une question qui n'a jamais réellement été posée sans doute parce que cette opinion publique n'était pas seulement spectatrice de ces changements, mais aussi actrice. Et c'est sans doute en cela que réside aujourd'hui la force des sondages aux vues de son histoire, on se rend compte qu'il s'agit en fait d'une définition de l'opinion publique par elle même. [...]