Les sondages et l'opinion publique - publié le 28/06/2010

Extraits

[...] Pour Loic BLONDIAUX, les sondages agissent avant tout pour les acteurs politiques, car ils leur permettent de contrôler l'opinion publique réelle. L'intérêt majeur des sondages concernerait donc les politiques, car ce sont eux qui les commandent. D'après Dominique REYNIE, les sondages iraient encore plus loin. Ils seraient utilisés pour maintenir un ordre démocratique dans lequel ils contrôleraient les citoyens L'opinion publique serait donc indéfinissable, on peut juste définir ce qu'elle n'est pas. Les sondages eux, voient leurs rôles primaires évolués vers des dimensions beaucoup plus importantes, telles que la politique ou l'économie. [...]

[...] Les sociologues commencent alors à s'interroger sur son existence. Pour Pierre BOURDIEU, l'opinion publique n'existe pas, en tout cas sous la forme que lui donnent ceux qui ont intérêt à affirmer son existence. On peut seulement percevoir une illusion. Il est inadéquat de mesurer l'opinion à l'aide d'un pourcentage. On essaye simplement de convaincre la société que la réalité de l'opinion est dans des tableaux et qu'elle peut être comptée. Loic BLONDIAUX conteste également son existence en listant les critères d'une supposée opinion publique On peut alors remarquer le paradoxe entre l'impossibilité de définir les termes opinion publique et la capacité qu'ont les sondages à la mesurer. [...]

[...] Or, il existe tout de même des moyens pour la mesurer, tels que les sondages. Mais comment peut-on mesurer quelque chose d'indéfinissable ? Qu'est-ce que mesurent alors les sondages ? I. L'opinion publique : une notion floue Les termes opinion publique sont utilisés dès le Siècle des lumières. Ils ont alors deux sens. Pour la philosophie classique, il s'agit d'une référence idéalisée, elle représente un idéal d'espace public dans lequel une frange éclairée se prononce sur les affaires publiques à l'issue d'un processus d'information. [...]

[...] Pour de nombreux sociologues, les sondages ne peuvent en aucun cas mesurer l'opinion publique. D'après Lindsay RODGERS, il est absurde d'interroger les gens sur une opinion qu'ils n'ont pas développée au préalable. De plus, l'opinion publique est un processus collectif et évolutif qui se forme, elle ne peut donc pas se réduire à une simple addition d'opinions individuelles, mais doit être l'émanation d'un échange. Pierre BOURDIEU dénonce le fait que toutes les opinions ne se valent pas. Certaines opinions sont plus réelles que d'autres, la thèse d'un homme = une opinion est une absurdité sociologique qui provoquerait des conséquences. [...]

[...] Les sondages peuvent manipuler l'opinion publique, grâce à la nouvelle vision qu'ils ont donnée d'elles. Le sondage d'opinion a ouvert la démagogie rationnelle, c'est pourquoi l'on peut affirmer que l'opinion publique est sans doute aujourd'hui plus manipulée que jamais La manipulation a lieu sans manipulateur identifiable. La manipulation collective est instaurée par tous les agents politiques et le résultat final est mesuré par des instituts. L'opinion publique est alors utilisée comme un véritable trophée afin de trancher les conflits internes au sein des productions. [...]