La flexisécurité

Extraits

[...] A la question que lui a posée Stéphane Colineau sur cette prise de risque énorme François Fillon a répondu nous prendrions ce risque, car c'est une question de vie ou de mort pour la société française La mise en place d'un modèle de flexisécurité n'est donc pas exempte de controverses, qui sont du reste d'autant plus vives dans un contexte de crise où le chômage est une question de société de plus en plus centrale et douloureuse. Si le modèle de flexisécurité semble donc être une réponse crédible à la rigidité du marché du travail et aux lourdes conséquences sociales que cela suppose, sa mise en place reste difficile, d'autant plus que son bon fonctionnement est sans doute tributaire du type d'organisations sociales des pays dans lesquels il est appliqué. [...]

[...] La flexibilité d'abord, se traduit par une plus grande facilité à licencier pour les employeurs ainsi qu'une prise de risque amoindrie lorsqu'il s'agit d'embaucher (par exemple en rallongeant la période à l'essai). Ces deux mesures favorisent ainsi la mobilité sur le marché du travail, permettant une croissance économique plus optimisée. Cependant, cela engendre une précarisation des emplois, ce pour quoi vient en compensation de la flexibilité le second volet du modèle de flexisécurité : la sécurité. Ce second aspect tend à protéger les salariés et non les emplois et ce, en proposant des indemnisations chômage plus importantes, ainsi que des formations. [...]

[...] Il y a en outre une uniformisation de la politique du travail de l'emploi. Ainsi, pour reprendre l'exemple du Danemark puisqu'il fait référence en la matière, les organismes de l'emploi et de l'aide sociale y ont été centralisés et regroupés sous un seul ministère (même si, en 2009, le gouvernement de Rasmussen a engagé une politique de décentralisation des allocations chômage). Le volet sécurité serait quant à lui assuré par une augmentation et un allongement des indemnités chômage (tout en faisant le pari que l'allongement ne sera que théorique puisque l'objectif du modèle est précisément de permettre des réinsertions rapides sur le marché du travail) et par une prise en charge des salariés par l'Etat en cas de chômage (ce qui implique une bonne gestion de la fiscalité qui sera le fond permettant ces redistributions). [...]

[...] Ainsi, Roger Boyer résume le concept de flexisécurité en le posant comme un modèle qui organise la complémentarité de trois dispositifs habituellement faiblement coordonnés : le droit du travail, le régime d'indemnisation chômage et la politique de l'emploi Critiques et limites de la flexisécurité Nous avons vu que la flexisécurité avait quelques difficultés à s'exporter hors des pays scandinaves dans lesquels elle a été d'abord adoptée. De fait, de nombreuses critiques sont adressées à son encontre. L'accord du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail n'a été signé que par quatre syndicats sur huit. [...]

[...] En France, c'est avec la prise de conscience de l'ampleur du phénomène schumpetérien de destruction créatrice sur le marché du travail dans les années 80 époque à laquelle les économistes ont accès pour la première fois à des données précises sur les créations et destructions d'emplois (on se rend compte que emplois apparaissent et autres disparaissent chaque année en moyenne)- que l'on commence à s'intéresser au modèle scandinave de flexisécurité. Cependant, les tentatives faites par les voisins européens de ces pays pour intégrer ce modèle dans leurs économies ont pu faire l'objet de vives critiques, notamment par les syndicats, qui y ont vu un facteur d'aggravation de la précarité. Qu'en est-il donc vraiment ? Quels sont les objectifs visés par les politiques de flexisécurité et comment sont-ils atteints ? [...]