"L'Europe, l'Amérique et le monde" de Jean-Marc Ferry
Résumé de la fiche de lecture
L'ouvrage porte le titre L'Europe, l'Amérique et le monde ; or, il s'ouvre justement sur la difficulté à traiter de l'Europe comme d'un ensemble univoque et établit une distinction entre l'Europe et l'Union Européenne, invitant à différencier les limites de l'Union et les frontières de l'Europe. L'Europe ne présente ni frontières naturelles, ni claires délimitations culturelles et historiques. Ce que les Grecs nomment « Europe » dès le VIIe siècle avant Jésus-Christ, correspond d'ailleurs à cela : une zone sans frontières, une zone secondaire. Géophysiquement, l'Europe ne présente aucune légitimité : elle est avant tout un cap, un appendice de l'Asie. Elle n'est pas, à proprement parler, un continent mais constitue bien plutôt une fiction fondée sur les réalités d'une presqu'île, faisant d'elle, plus évidemment que tous les autres continents, l'oeuvre des hommes et non de la nature. C'est en ce sens que la réflexion de Jean-Marc Ferry interroge les limites internes et externes de et à l'Union. L'identité européenne, l'esprit européen serait alors avant tout herméneutique puisque la circoncision de l'Union ne résulte pas d'une définition préalable de l'identité européenne ; L'Europe se veut un projet qui tirerait son identité de son oeuvre.
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Sommaire de la fiche de lecture
Les limites internes et externes de et à l'Union
L'Europe se veut un projet qui tirerait son identité de son oeuvre
Le contenu de l'Union Européenne et de la forme de la démocratie européenne
Critique de l'oeuvre
Extraits de la fiche de lecture
[...] Y a-t-il un sens à si clairement séparer, pour reprendre la distinction de Nye, le hard du soft power ? Il semble bien plutôt que la puissance d'aujourd'hui s'entende comme une capacité d'alternance des moyens : de la domination culturelle à la coercition militaire, l'une pouvant soutenir l'autre, et toujours dans le but de faire triompher sa volonté sur celle d'un tiers. Pour Ferry, l'une des conditions d'existence de cette Europe à orientation kantienne est à lier à l'affirmation (auto)critique des droits de l'homme. [...]
[...] Cependant, parler d'une constitution européenne, ne revient-il pas à remettre en cause la possibilité même d'une communauté européenne ? Et pour cause, la contestation de la construction européenne s'effectue bien souvent en vertu d'arguments nationalistes, refusant une intégration synonyme d'annihilation de toute spécificité patriotique et nationale. En d'autres termes et pour reprendre l'expression de Norberto Bobbio, les adversaires de l'UE décrient la démocratie procédurale pourfendeuse de la République substantielle Ces thèses, largement opposées au courant libéral, craignent de l'affirmation du primat de l'individu, la disparition de la société en tant que tout. [...]
[...] ) cette ignorance est le gage de son impartialité p.65 Bobbio, Norberto, L'Etat et la démocratie internationale, Complexe p.27 p.66 p.66 Magnette, P., Argumenter et négocier dans une Assemblée constituante transnationale : une analyse de la Convention Européenne manuscrit, Université libre de Bruxelles p.94 : Seules peuvent prétendre à une valeur légitime les lois juridiques qui peuvent trouver un accord de tous les membres de la communauté légale dans un processus discursif et juridiquement constitué de production du droit p.96 : Le socle des droits de l'Homme est nécessaire à la reconnaissance mutuelle des citoyens, d'abord, en tant que sujets de droit effectifs dont les prises de position ont statutairement le même poids, ensuite, en tant qu'auteurs des normes dont ils sont destinataires. Thual, François, les conflits identitaires, Ellipse/IRIS Rougemont, D. de, Utopie, technique, Etat-nation Cademos p Ferry, J.-M., La question de l'Etat européen, Gallimard, coll. NRF Essais p.11 Ferry, J.-M., op. cit. [...]
[...] Plus précisément, peut-il y avoir de puissance politique autre que dans, par ou moyennant la violence ? Bien évidemment, cette question procède d'un abus de langage. Il pourrait être davantage opportun de distinguer la puissance de la violence. Nous pourrions ainsi affiner la réflexion de Ferry en postulant que la spécificité de l'Europe est celle de construire une entité politique, de déployer une puissance sans recours à la violence. Dans une approche kantienne, les Européens compteraient sur une puissance morale et critique, et non pas une puissance uniquement physique. [...]
[...] Pour autant, l'Europe ne se pense pas dans une perspective messianique d'extension mondiale de son système de fonctionnement. La construction européenne repose au contraire sur l'affirmation de la spécificité de l'ensemble régional, à même de contrebalancer la stratégie d'«hyperpuissance américaine. Si se trouve donc par là réfutée, la visée d'un ordre cosmopolitique global passant par une conquête progressive, la stratégie de l'Union Européenne se trouve en revanche plus proche de l'idée du cosmopolitisme juridique développée par Kant : l'Union vise en effet à élever le respect des droits individuels au niveau interétatique, les plaçant dans un même ordre d'existence. [...]