A l'heure où, au Caire, vingt-trois jeunes Egyptiens sont condamnés à la prison pour homosexualité, on peut, en France, contracter un PaCS virtuel sur le site internet du journal Le Monde1, et se voir décerner par certains maires consentants un certificat, diplôme ou livret recouvert de velours bleu, avec la mention « Livret du PaCS ».2 Deux ans après la mise en application de la loi n 99-944 du 15 novembre 1999 relative au Pacte civil de solidarité (PaCS), un rapport parlementaire en dresse un bilan très positif : le PaCS a joué le rôle d'accélérateur de la conscience collective et a permis le recul de l'homophobie.3 Pourtant, politiquement, la double question du mariage et de la filiation a été mise entre parenthèses par le gouvernement lors de la rédaction du texte de loi : il s'agit d'ouvrir à l'homosexualité le couple, mais non la famille. Il semble qu'au nom de la science, qui pose la différence des sexes et l'hétérosexualité au principe du mariage et de la filiation, ces questions aient échappé au débat démocratique. Mais peut-on légitimer des choix politiques en reprenant à son compte un partage qui trouve sa logique moins dans la négociation politique que dans quelque ordre symbolique ? Peut-on, au nom d'une vérité scientifique, soustraire le mariage et la filiation à la délibération politique et en interdire l'accès aux homosexuels ? Il s'agit de porter un regard critique sur les arguments scientifiques mobilisés dans le débat, mais aussi sur la légitimité d'une argumentation de type savant pour fonder des choix politiques.
[...] Il semble que la majorité des revendications aient été prises en compte dans le rapport-bilan parlementaire publié le 13 novembre 2001. Par les rapporteurs du PaCS Les députés Jean-Pierre Michel (MDC) et Patrick Bloche rapporteurs de la proposition de loi sur le PaCS, ont remis, mardi 13 novembre, un premier bilan de l'application de la loi. Ils en dressent un bilan très positif, notant que PaCS ont été conclu depuis son entrée en vigueur (soit quelque contractants) ; ce qui représente un taux de succès de 60% supérieur au contrat du même type mis en place aux Pays-Bas. [...]
[...] Ouvrages : Théry Couple, filiation et parenté aujourd'hui, le droit face aux mutations de la famille et de la vie privée, Paris, Odile Jacob / la Documentation française Agacinski Politique des sexes, Paris, Le Seuil Cadoret Parenté plurielle, anthropologie du placement familial, Paris, L'Harmattan Borillo et Fassin Au-delà du PaCS, Paris, PUF, Politique d'aujourd'hui Autres références : Rapport sur l'application de la loi 99-944 du 15 novembre 1999 relative au PaCS, présenté le 25 janvier 2001 par Michel BUJARDET, président du Centre gai et lesbien, devant la Commission Parlementaire, constituée par Messieurs Patrick BLOCHE et Jean-Pierre MICHEL. Auber Note sous arrêt Cour de cassation, 3è Civ. Du 17 décembre 1997, Recueil Dalloz 9è Cahier jurisprudence, p. 114-115 APGL (sous la dir. [...]
[...] Le PaCS aurait pu permettre de réfléchir à la modernisation de l'union. Cela n'a pas été le cas. C'est vraiment un minimum symbolique accordé aux homosexuels, une demi-mesure qui témoigne d'un manque de courage du gouvernement et des députés. Les associations regrettent surtout que le texte du PaCS ne fasse nulle mention de quelconques droits familiaux, qui auraient ouvert l'accès à la procréation médicalement assistée et à l'adoption. Au Centre Gai et Lesbien on se demande ainsi pourquoi les hétérosexuels stériles y ont droit, et non les homosexuels Ce n'est pas une question de nature, c'est un choix de société argumente Caroline Fourest, coprésidente de Prochoix. [...]
[...] L'Observatoire du PaCS2 dénonce ainsi les incohérences du texte et s'engage à en corriger les lacunes. Quelles sont précisément certaines de ces lacunes ? Au-delà du regret déjà cité des couples de même sexe de ne pas voir s'ouvrir l'accès à la procréation médicalement assistée et à l'adoption, la première lacune du PaCS est sans doute l'incohérence sociale et juridique qu'est le refus d'ouvrir le mariage aux couples de même sexe. L'adoption le 19 décembre 2000 par le Sénat néerlandais du mariage homosexuel, alors que ce pays avait lui aussi créé l'équivalent du PaCS, montre bien qu'il existe là une logique de complémentarité, plus que de concurrence, et que le PaCS ne suffira pas à satisfaire complètement les besoins de la population. [...]
[...] La référence anthropologique dans le discours politique a donc pour fonction de refuser d'ouvrir aux homosexuels le mariage et la filiation, sans pour autant devoir justifier politiquement ce refus. L'« anthropologie permet d'échapper au débat démocratique, au moment où il menace de s'ouvrir. Encore faut-il comprendre pourquoi les politiques reculent devant la justification politique de leurs choix en matière d'homosexualité. Pourquoi, au lieu d'aller chercher une justification en dehors de la politique, avec un vocabulaire anthropologique emprunté, ne pas simplement proposer des objections politiques ? [...]