La Ve République est-elle une monarchie républicaine ?
Résumé de l'exposé
La Constitution de 1958 constitue une véritable révolution par rapport aux constitutions précédentes, selon la volonté du Général de Gaulle qui voulait établir une différence radicale entre les deux Républiques précédentes et entre leurs présidents ne servant selon ses propres mots qu'à "inaugurer les chrysanthèmes". C'est pour cela que celui auquel est à présent conférée par la constitution la "charge insigne du destin de la France" ne peut demeurer confiné, comme autrefois, dans un rôle de conseil et d'influence dérisoire.
Tout semble désigner la Ve République comme une monarchie républicaine. Celle-ci semble tendre vers une forme monarchique dirigée non plus par des rois héréditaires, mais bien par des "rois élus". Autrement dit, un système politique où le pouvoir est élu par le peuple, mais qui semble souffrir de cette étrangeté révélée par Maurice Duverger : le fait que les démocrates se donnent des rois.
Dans quelle mesure la Ve République consacre-t-elle un pouvoir exécutif fort détenu dans les mains d'un seul homme traduisant ainsi la mise en place d'une monarchie républicaine ?
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Sommaire de l'exposé
La Ve République, la prépondérance du chef de l'exécutif dans la vie politique
La mise en place d'un régime contre le parlementarisme
La monarchie républicaine à travers les présidences
Les limites à la puissance de l'exécutif et du président
La cohabitation (1986-1988, 1993-1995, 1997-2002) ou l'avènement d'une logique diarchique du pouvoir
La mutation des institutions depuis les années 80 : une présidence encadrée
Extraits de l'exposé
[...] C'est pourquoi dès sa fin définitive, le présidentialisme va reprendre ses droits. On le voit ainsi dans la politique de Chirac, puis de Sarkozy (cf I/A/2.). Pourtant, le monarque républicain est encore limité dans ses droits, comme dans la pratique. Cependant la disparition de la figure du monarque avec l'émergence d'une présidence modeste ne s'explique pas seulement par la montée en puissance d'un pouvoir concurrent. Derrière l'affrontement au sommet, se déroule une mutation accélérée qui modifie la distribution du pouvoir. [...]
[...] Dans ces périodes le pouvoir présidentiel se trouve assez largement réduit puisque les élections ont pour résultat des majorités législatives qui sont opposées aux vues du président de la République et que de ce fait celui-ci se trouve amené à nommer comme 1er ministre un homme qui lui est opposé, alors que celui-ci est théoriquement chargé de mettre en ?uvre ses décisions. Le président de la République a donc moins les moyens de sa gouvernance, et son recul se fait évidemment au profit du premier ministre. Même si François Mitterrand maintient pour l'essentiel les fonctions d'incarnation de la république dont il dispose, en particulier sur le plan de la défense et des affaires étrangères, la politique intérieure lui échappe pour l'essentiel au profit du 1er ministre. [...]
[...] Dans quelle mesure la Vème République consacre-t-elle un pouvoir exécutif fort détenu dans les mains d'un seul homme traduisant ainsi la mise en place d'une monarchie républicaine ? Après avoir montré l'étendue des pouvoirs du Président de la République et sa prépondérance dans la vie politique française tout au long de la Cinquième République, nous verrons qu'il est souvent confronté à des acteurs et institutions qui viennent contrecarrer sa puissance et mettre en doute l'existence d'une véritable monarchie républicaine. I. [...]
[...] Le conseil constitutionnel va ainsi trouver sa place entre la majorité et l'opposition afin de rééquilibrer la politique. A chaque alternance politique, le Conseil constitutionnel apparaît donc désormais comme un contre-pouvoir fort capable de servir de frein à tous les excès législatifs des majorités installées. En 1982, par exemple, le Conseil constitutionnel a ainsi censuré la loi relative aux nationalisations adoptée par la majorité socialiste de même qu'en 1993, il a procédé à la censure des dispositions sur les droits d'entrée et de séjour des étrangers adoptée par la majorité de droite. [...]
[...] Grâce aux pouvoirs constitutionnels, le Président de la République conserve la parole présidentielle pendant et après le conseil des ministres, et reste toujours responsable des nominations. Il jouit aussi d'un cortège moral qui lui fait endosser encore un rôle majeur dans l'opinion publique. De plus, il peut mettre fin à la cohabitation en cas de conflit au sein de la majorité parlementaire. L'autorité détenue par le premier ministre en période de cohabitation est aussi différente de celle détenue par le président en période de présidentialisme. [...]